Politeia
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Après l’éclatement du scandale Orpéa qui entache l’univers des établissements privés pour les personnes âgées dépendantes, c’est le secteur de l’aide à domicile qui se retrouve singulièrement mis en lumière aujourd’hui. Or si plus de 80% des Français expriment leur souhait de mieux vieillir chez eux, les difficultés d’attractivité rencontrées par le secteur de l’aide à domicile touchent le métier très globalement : structures privées, publiques, associatives…
Mais, alors que le Ségur de la santé, en décembre 2020, avait permis au personnel soignant d’obtenir une revalorisation salariale de 180 euros net par mois, que les aides à domicile relevant du secteur associatif avaient obtenu en octobre 2021 (avec l’avenant 43 de leur convention collective) une revalorisation de 15 % (soit un gain de 200 à 250 euros net), jusqu’à aujourd’hui, les aides à domicile du secteur public restaient les grandes oubliées des revalorisations financières des métiers de l’aide à domicile. Une annonce attendue aujourd’hui devrait finalement leur permettre de bénéficier de cette reconnaissance, et, espérons-le, de stopper l’hémorragie, dans un secteur où 15% à 30% des postes sont vacants et où 70% des employeurs rencontrent des difficultés de recrutement.
Faibles rémunérations, pénibilité physique et psychologique, la crise sanitaire est venue porter le coup de grâce à un secteur déjà en déficit d’attractivité. Comme un catalyseur, elle a révélé toutes les faiblesses des services d’aide à domicile (plannings instables, manque de cohésion d’équipe, de reconnaissance, d’autonomie…) et le nombre de départs et d’arrêts maladie a fortement augmenté, accentuant d’autant les difficultés organisationnelles des SAAD.
Alors que l’enjeu d’adapter la société au vieillissement est grandissant (d’ici à la fin de la décennie, notre pays devrait compter plus de 200 000 personnes âgées supplémentaires en perte d’autonomie) et que la volonté d’encourager le maintien à domicile des personnes âgées s’affirme, la question de la pérennité des services à domicileest plus que jamais d’actualité. La revalorisation des rémunérations annoncée doit être saluée, et permettra peut-être de ralentir les départs, mais il est légitime de penser qu’elle ne permettra pas de renouer avec l’attractivité. Car l’écart est abyssal entre la volonté collective de maintenir à domicile les personnes âgées et la crise de reconnaissance de ces métiers. Cet écart dépasse largement 180€ / mois, et ne se comblera pas uniquement avec une revalorisation financière. Or la pénurie s’accentue et dans moins de dix ans la moitié des salariés de l’aide à domicile partira à la retraite.
Alors que faire ? Face à ces difficultés de recrutement, le secteur public et les collectivités territoriales en première ligne, se retrouvent le plus souvent face à un « non choix » entre :
– « l’ubérisation » de leur service, où les collectivités, devenues « service mandataire », jouent les intermédiaires entre des aides à domicile indépendantes et des bénéficiaires « employeur » (quelle valeur ajoutée pour le service public en comparaison avec le service déjà rendu par de nombreux concurrents privés ?)
– et le transfert (vécu souvent comme inéluctable) au privé d’une activité devenue pour elles ingérable du fait du manque de personnel.
Dans ce contexte, il est indéniable que l’offre de service du secteur public apparaît comme particulièrement contrainte, enserrée par des injonctions souvent contradictoires entre contingence des moyens et maintien de la qualité de service.
Pour autant, la question qui se pose aujourd’hui aux collectivités territoriales est moins celle des moyens (bien qu’elle reste de taille) que celles des ambitions du service public. Car, le service apporté par le secteur public est sans égal et il doit être préservé : qui d’autre que les SAAD publics pour s’engager au service des bénéficiaires en faisant les promesses de continuité de service et d’égalité d’accès ?
Dans ce contexte, pour les services d’aide à domicile du secteur public, la capacité à se réinventer de manière concertée et évolutive sera déterminante. Et pour y arriver, chez Politeia, nous croyons qu’il faut aborder l’attractivité du métier d’aide à domicile et des SAAD publics non seulement au travers du prisme financier, mais aussi et surtout au travers du prisme de l’épanouissement professionnel des agents, qui doit passer notamment par leur autonomisation, le développement de l’esprit d’équipe, l’accompagnement personnalisé des parcours professionnels, ou encore la communication auprès des bénéficiaires pour remédier au manque de considération…
De notre point de vue, c’est en affirmant la force et la singularité du service public de l’aide à domicile que les collectivités territoriales prendront le contre-pied d’un mouvement que chacun dénonce, en organisant ainsi pour les usagers et les aides à domicile un service de qualité où la force du lien remplace la course à l’optimisation.